Tell Rochat, un chemin vers la lumière

Sans cesse, l’œuvre de Tell Rochat ramène à la Vallée de Joux où il est né, le 9 janvier 1898, et qui a profondément marqué son regard et son imaginaire.

Des clairs obscurs, des nuages chargés de pluie surplombant des forêts aux sombres futaies, des lacs tels des miroirs reflétant le ciel, des arbres aux vives couleurs d’automne ou encore des portraits et des scènes paysannes empruntes de sérénité : sans cesse, l’œuvre de Tell Rochat ramène à la Vallée de Joux où il est né, le 9 janvier 1898, et qui a profondément marqué son regard et son imaginaire.

Nul ne sait comment l’idée lui est venue de se consacrer à la peinture. Tout ce que l’on sait, c’est qu’il a réalisé sa première toile en 1915, à l’âge de 17 ans. Rien ne prédestinait ce jeune homme, né aux Places sur le Pont en 1898 dans une famille de modestes paysans, à devenir un peintre renommé jusqu’au-delà des frontières de la Suisse et qui a marqué sa génération. Bûcheron, paysan et artiste, sa vie a balancé entre deux mondes, celui des champs durant l’été où il aide ses parents Henri-Samuel et Mélanie Rochat, et celui de son atelier dans la maison familiale, durant l’hiver, où il se dédie à son art avec patience et obstination.

Il profite aussi de la saison froide pour parfaire sa formation. En 1924, il entre à l’Académie Loup à Lausanne, où il étudie la peinture. Puis durant les hivers 1926 et 1927, il se rend à Paris, d’abord auprès des professeurs Paul-Albert Laurens, puis auprès d’André Lhote. Il profite de ses séjours dans la Ville lumière pour travailler la gravure sur bois avec Constant Le Breton.

D’abord naïf, le style de Tell Rochat évolue au fil du temps, se fait plus sûr et plus profond. À deux reprises, en 1931 et 1932, il remporte la bourse fédérale des Beaux-Arts. Ces prix ont une incidence importante sur son évolution en tant qu’artiste, non pas tant pour la renommée qu’ils pourraient lui valoir, que parce qu’ils lui permettent de voyager, à travers l’Europe, notamment des côtes de la Bretagne, à l’Alhambra de Grenade Espagne en passant par les canaux des Pays-Bas et le soleil de l’Italie. À l’occasion de ses voyages, il visite de nombreuses expositions, admirant sans réserve les œuvres de ses peintres préférés, Rembrandt, Vélasquez, Goya, Corot, Renoir ou Van Gogh.

Atteint d’un diabète qui, toute sa vie durant a fragilisé sa santé, et sans doute influencé son caractère réservé et solitaire, « il était tout simple, pas très grand, un visage pâle illuminé d’un beau sourire. Peu causeur ou timide avec les visiteurs (…),à bien le connaître, cette sorte de réserve faisait place à une franche camaraderie », écrit de lui Gilberte, l’épouse de Pierre Aubert, autre peintre de la Vallée et grand ami de Tell. Sa maladie finit par l’éloigner de la Vallée, au climat trop pénible pour lui. En 1933, il achète une maison à Villars-sous-Yens où pendant six ans, il continue de peindre. Cet acharnement au travail lui permet de réaliser plusieurs expositions en 1935, 1937 ainsi qu’en 1938 où il présente une série de toiles au Pont. Cette dernière exposition est un succès. Il décède à Lausanne le 16 novembre 1939, nous laissant en héritage plus de 700 huiles, aquarelles, dessins et gravures. Tell Rochat a su, comme personne, rendre la transparence de la lumière.