Michel Rochat

Le Vaudois voyageur

« Quand les racines sont profondes, les branches sont plus longues ». L’image illustre bien le destin de Michel Rochat entre la terre vaudoise à laquelle il est foncièrement attaché et une planète Terre presque trop petite pour lui et qu’il parcourra de long en large, notamment dans son rôle de directeur de l’École hôtelière de Lausanne ou EHL pour les intimes.

Né à Lausanne en 1956, Michel passe son enfance d’un endroit à l’autre du canton de Vaud au gré des affectations de ses deux parents instituteurs : de Forel-Lavaux à Corcelles-Payerne en passant par Cheseaux sur Lausanne ou l’Auberson. « Chacun de ces séjours m’a marqué. Qu’un territoire si limité puisse offrir une telle variété de paysages et d’environnements me paraissait exceptionnel », se souvient-il. À l’âge de 20 ans, son livre de chevet, c’était le « Portrait des Vaudois » de Jacques Chessex. « Un livre tellement juste que je m’y sentais comme chez moi. » En même temps, Michel Rochat rêvait d’ailleurs, de Californie surtout, influencé par les films des années 60, la musique des Beach Boys et la vision Golden Gate, « un pont qui avait pour moi une valeur symbolique et que j’espérais traverser un jour ».

Après une maturité à l’École de Commerce, il poursuit ses études à la Faculté des Hautes Études commerciales, aujourd’hui rebaptisée HEC Lausanne : « À l’époque c’était une super-école de commerce, bien plus qu’une université au sens étroit du terme. Mes maîtres étaient d’anciens professionnels, des pragmatiques jouissant d’une carrière pratique », raconte-t-il. Et quand ces personnalités lui parlaient de l’économie du canton, il revoyait défiler son enfance, retrouvant le portrait des Vaudois. Toutefois, la personnalité qui le marque le plus, c’est Henri Rieben, grand Européen et ami de Jean Monnet, qui a fondé dans la capitale vaudoise le Centre de recherches européennes. « Ce fut un modèle pour moi, tant sur la forme que sur le fond. Il m’a profondément influencé. »

Son premier poste, ce sera auprès du cabinet d’audit PwC, où l’homme d’action qu’est Michel, ne s’éternise pas. « Je voulais comprendre comment fonctionnaient les entreprises, mais après quelques années, j’ai préféré l’action plutôt que contrôler le travail des autres. » Il intègre, en tant que chargé de cours, l’École supérieure de cadres pour l’économie et l’administration (ESCEA), où il enseigne la comptabilité et la finance, et où il apprend tout en dispensant le savoir : « On commençait à établir des règles internationales et cela me fascinait. »

Il ne le sait pas encore, mais l’arbre est en train de déployer ses branches et son rêve de Californie est sur le point de se réaliser. Après plusieurs postes dans diverses hautes écoles, puis un mandat de la Confédération pour évaluer les HES suisses et comme certificateur ISO pour l’industrie et les services, Michel reprend à la demande de la cheffe du Département de l’instruction Anne-Catherine Lyon, la tête des HES vaudoises. « Pour en faire la promotion, j’ai parcouru différents États américains, dont la Californie. » San Francisco devient ainsi sa ville préférée. « Je l’aime tellement que je me peux m’y promener sans GPS, j’ai le plan en tête. »

Mais le vrai tournant de sa carrière a lieu en octobre 2009 lorsqu’il est nommé à la tête de l’EHL. « Cela s’est passé naturellement, s’étonne-t-il encore. Comme des pièces qui se sont mises en place toutes seules à l’insu de mon plein gré. » Son mandat, ambitieux, est de transformer cette école supérieure professionnelle suisse en groupe d’éducation ouvert sur le monde. Le plus important pour lui est de parvenir à consolider l’école tout en la projetant à l’international et dans l’avenir.

Et Michel Rochat réussit au-delà de tout espoir : dorénavant, l’ EHL pilote une dizaine de programmes académiques dans le monde entier. En 2019, la HES vaudoise reçoit une étoile au Michelin pour l’excellence de son restaurant entièrement géré par des étudiants, et en 2019, elle a fait son apparition dans le classement mondial QS des universités en tant que meilleure du monde dans sa catégorie. « Notre HES a pour vocation de dispenser à nos étudiants une formation académique, tout en conservant un important volet pratique. Pour notre école, c’est une valeur gigantesque ajoutée à la formation », dit Michel Rochat., sans cacher son enthousiasme.

En 2014, il reçoit l’« Hospitality Innovation Award » et est reconnu par le magazine Bilan comme l’une des 100 personnalités suisses les plus influentes : « J’ai accueilli ces distinctions avec le sentiment que je pourrais en faire plus, et expliquer mieux encore quelles sont les forces de la Suisse et comment elle peut les exploiter pour aller de l’avant. » Une mission qu’il va poursuivre après sa retraite de l’EHL en décembre 2022 en tant que Président de l’Office des Vins Vaudois et de Vaud Promotion, chargée de promouvoir sa terre vaudoise en fédérant les acteurs vaudois des mondes économique, touristique, culturel, et viticole. Une fonction qui va lui permettre à ce Vaudois de cœur qui parcourt le monde de Schwyz à l’Afrique, « de porter la bonne parole encore plus loin. »