Laurence Rochat

Une vie entre forces de la nature et univers du luxe

Derrière son physique délicat d’ange blond, la championne de ski de fond Laurence Rochat est à quarante-trois ans, une femme solide, engagée, forte et pleine de confiance. Mais cette assurance et cette ouverture ne sont pas tombées du ciel. Elles proviennent d’une vie faite d’efforts, de rencontres, de curiosité et aussi d’épreuves. Née à la Vallée de Joux, le 8 août 1979, elle passe une enfance « très simple et très riche », dans la ferme de ses parents et auprès de la nature et des animaux : « Comme c’est le cas de nombreux paysans, nous ne voyagions pas à cause du bétail, mais nous faisions beaucoup de sport en plein air ».

Le sport et le dépassement de soi sont des valeurs importantes dans la famille de Laurence. Sa mère Simone est l’une des premières femmes à séjourner dans les cabanes du club alpin lors de ses randonnées à peau de phoque. Quant à son père Michel, il est champion romand de ski de fond , tout à côté de son métier de paysan. « Je l’admirais. C’était mon héros et je voulais faire comme lui. » Qu’à cela ne tienne. Elle chausse ses premiers skis à l’âge de deux ans et ne s’arrête plus de glisser. Bravant le froid et la neige, elle suit son père qui devient son premier conseiller: « Je me suis transformée en machine assez vite. J’avais l’esprit de compétition. Je suis née avec, raconte-t-elle. Et je voulais battre les garçons. » Elle fait sa première course à l’âge de six ans, et remporte son premier titre à quatorze ans.

En 1994, Laurence regarde en famille les Jeux olympiques de Lillehammer. C’est un déclic : elle veut participer aux Jeux et faire de ce projet sa vie : « J’étais si sûre de moi, que tout s’est engrangé à partir de là. » Selon la championne, le succès est une question de désir et de volonté : « J’ai appris à me connaître dans l’adversité, par les douleurs, les difficultés jusqu’à dépasser mes limites. Le sport est une école de vie et le cerveau nous suit là où l’on veut aller. » Et elle est allée loin, c’est le moins que l’on puisse dire. Aujourd’hui, après plus de 500 compétitions dans le monde entier, elle a à son actif trois participations à des Jeux Olympiques, dont une médaille de bronze en relais à Salt Lake City en 2002, 144 départs en Coupe du monde et cinq ans passés dans le groupe rouge des 30 meilleures fondeuses du monde.

Voilà pour le côté pile. Côté face, Laurence fait carrière au sein de la prestigieuse entreprise horlogère Audemars Piguet. « Cela fait 27 ans que j’y travaille, raconte-t-elle. J’y suis arrivée un peu par hasard. À la vallée de Joux, ou tu faisais du ski de fond, ou de l’horlogerie, ou tu étais paysanne. » Elle grimpe les échelons, travaille dans le département événements, puis devient responsable de l’hospitalité. En 2020, lorsque Audemars Piguet change de stratégie, renonçant à la clientèle de détail pour se concentrer sur le contact avec le client individuel, l’entreprise la nomme ambassadrice de la marque, en phase avec la nouvelle stratégie people to people, profitant ainsi de l’immense réseau de Laurence qui est chargée trouver de nouveaux clients, à qui elle fait connaître la marque et sa philosophie : « La marque me correspond, et je lui corresponds. Elle m’a fait confiance et en retour je lui donne mon engagement. C’est le match parfait. »

Outre un carnet d’adresse bien fourni, le sport lui a amené des qualités précieuses pour son métier, comme l’empathie, la curiosité et le goût de la perfection. « Tout s’est mis en place naturellement pour moi. Ma vie est cohérente, que je n’ai absolument pas peur pour mon avenir. » Et aujourd’hui, elle vit entre ces deux mondes. Elle est aussi à l’aise dans sa combinaison de sport qu’elle enfile pour faire de l’exercice dans la nature sauvage, qu’en robe de soirée pour représenter son employeur dans un palace : « Je dis toujours que je suis un sac Hermès avec un saucisson à l’intérieur. Cette capacité de faire le grand écart, c’est ce qui fait ma force. »

En 2006, elle rencontre son compagnon, le chef étoilé Philippe Rochat de 26 ans son aîné. Leur union ne doit rien au hasard. Tous deux issus d’une famille paysanne, ils partagent le goût de la nature et de l’effort. Et le goût du beau, de la gastronomie et des vins. Et aussi une quête permanente de qualité. « C’était mon amour, mon guide, mon frère. Il pouvait être adorable, comme tyrannique. J’ai tant appris auprès de lui qu’il m’a fait entrer dans la vie d’adulte. » Mais en 2015, à 61 ans, Philippe décède lors d’une balade à vélo. Le chagrin de Laurence est immense : « J’étais mariée avec un veuf et je suis devenue veuve. Ce sont des épreuves dures. »

Aujourd’hui, sept ans après, grâce à cette richesse intérieure qu’elle a cultivée tout au long de sa vie, elle est heureuse. Elle prend du temps pour randonner, pour méditer, pratiquer le yoga, voir sa famille et ceux qu’elle aime. Et elle a retrouvé joie de vivre et équilibre auprès de son nouveau compagnon, Marc Girardelli. « Les gens positifs me ressourcent. M’intéresser aux autres, à mes clients, comme à mes amis, c’est vital. »